Pierre du Buat

Pierre du Buat
Portrait du comte Pierre Louis George du Buat. suivie de son blason.
Fonctions
Directeur
Compagnie des mines d'Anzin
à partir de
Gouverneur militaire
Vieux-Condé
à partir de
Titre de noblesse
Comte
Biographie
Naissance
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TortisambertVoir et modifier les données sur Wikidata
Décès
Voir et modifier les données sur Wikidata (à 75 ans)
Vieux-CondéVoir et modifier les données sur Wikidata
Nom dans la langue maternelle
Pierre Louis du BuatVoir et modifier les données sur Wikidata
Nom de naissance
Pierre Louis George, comte du BuatVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalité
françaiseVoir et modifier les données sur Wikidata
Formation
Activités
Ingénieur militaire, ingénieur hydraulicien, ingénieurVoir et modifier les données sur Wikidata
Famille
Famille du BuatVoir et modifier les données sur Wikidata
Autres informations
Membre de
Académie des sciences (-)Voir et modifier les données sur Wikidata
Grade militaire
Distinction

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Pierre Louis George, comte du Buat (né le à Tortisambert - mort le à Vieux-Condé), est un ingénieur et hydraulicien français qui a assisté l'abbé Bossut dans ses recherches d'hydrodynamique. Il a été colonel du Génie, Brigadier Lieutenant du roi, Chevalier de l'ordre royal et militaire de Saint-Louis[1].

L'ingénieur des fortifications

Promu ingénieur à sa sortie de l’école royale du génie de Mézières en 1750[2], du Buat a exercé la première partie de sa carrière sur les frontières du Nord. D'abord affecté à la réalisation du canal de jonction de la Lys à l'Aa[3], il travaille à la modernisation des fortifications des citadelles de Condé-sur-l'Escaut[3] de 1775 à 1780 et de Valenciennes (percement du bras du Jard[3], à partir de 1773). Il a été nommé en 1773 ingénieur en chef à Condé. Il épousa en 1758 la fille de Gérard Bosquet, régisseur de la Compagnie des mines d’Anzin, dont il fut ensuite actionnaire et administrateur. En 1788, il quitta le corps du Génie pour la charge de « lieutenant de Roi » à Condé ce qui fit de lui le substitut du gouverneur de la ville, Anne-Emmanuel de Croÿ. « À la famille princière, il était donc lié par la reconnaissance et l’intérêt ; il était l’homme du seigneur, et même son familier au point de partager à Paris sa voiture et son hôtel[4],[5]. »

Après avoir pris part dans les Pays-Bas aux premières campagnes de la Convention sous la direction de Dumouriez, il passe à l'ennemi en même temps que son général[3] (1793). La loi d’amnistie votée par le Consulat lui permet de reprendre du service après 1802, cette fois comme directeur de la Compagnie des mines d'Anzin.

Jusqu’aux travaux de Bélanger, les Principes d'hydraulique de du Buat demeurent la bible des ingénieurs hydrauliciens[3] : ils sont traduits en allemand par Woltman et Eytelwein en 1791.

Dès 1768, il avait introduit dans le dessin géométral des fortifications une convention importante pour résoudre le problème du défilement[6] : la représentation de la ligne de plus grande pente d'un talus, par l’intermédiaire d’une « échelle de pente » conventionnelle. Cette innovation a été immédiatement adoptée à l’école du génie de Mézières, et elle a été conservée en géométrie cotée[7].

L'hydraulicien

L'un des dispositifs de mesure des pressions de Du Buat

Parallèlement, il participe aux recherches lancées par d'Alembert et Bossut sur la résistance des fluides à l'avancement des navires (traînée) ; ses recherches sont consignées dans un traité intitulé Principes d'hydraulique (1779) et qui a connu plusieurs éditions encore sous l'Empire. Le succès de ce livre s'explique par les nombreuses données expérimentales et les explications sur le fonctionnement des machines hydrauliques, qui le distinguent des spéculations beaucoup trop théoriques de d'Alembert et d'autres auteurs. Ainsi, du Buat avait pu mesurer que la résistance d'un parallélépipède en déplacement dans l'eau (parallèlement à ses plus grandes arêtes) était due en partie à la surpression bien connue sur sa face avant, en partie à la dépression sur sa face arrière (dépression ignorée jusque là[8],[9]), et en partie aux effets de la viscosité de l'eau sur les parois parallèles au déplacement (ce qu'on appelle de nos jours la traînée de friction[10]). Pour du Buat, l'existence de cette traînée de friction pouvait tout à fait expliquer le paradoxe de D'Alembert qui n'était basé que sur l'intégration des différentes pressions.

Appliquant cette conception de la friction contre les parois à l'écoulement dans les canaux découverts, il propose une formule analogue à celle d'Antoine Chézy pour le débit des cours d'eau :

u = 2 g m i ( l h l + 2 h ) {\displaystyle u=2g\cdot m\cdot i\cdot \left({\frac {lh}{l+2h}}\right)} où u est la vitesse moyenne de l'eau,

  • g est l'accélération de la pesanteur,
  • m est un coefficient dépendant de la rugosité des berges,
  • i est la pente du fond de la rivière,
  • l est la largeur du lit,
  • h la profondeur de la rivière.

Du Buat étudia également la dépendance de la viscosité des liquides avec la température.
De même il proposa un calcul de la surface d'un parachute nécessaire pour qu'un homme puisse résister « à la commotion qui termine la chute » [c.-à-d. le choc de l'atterrissage] (voir ce calcul dans l'article Parachute).

À propos des apports de du Buat à la mécanique des fluides
Dispositif de mesure des pressions de Du Buat

Adhémar Barré de Saint-Venant écrit dans sa notice[11] consacrée aux apports de du Buat : « [Du Buat] reconnaît ingénuement, du reste, dans la question de la résistance des fluides, "n'avoir guère fait que détruire l'ancien édifice théorique" conservé dans tous les ouvrages de science navale, dans ceux même d'Euler quoique déjà battu en brèche par des faits nombreux, [...] ».

Citons quelques-uns des apports magistraux de du Buat à la mécanique des fluides:

À propos de l'existence d'une dépression de culot

Distribution des pressions sur la plaque carrée dans un courant d'eau, par Du Buat, 1786

Le même Barré de Saint-Venant note[12], à propos de l’existence d’une dépression de culot à l’arrière des corps :

« Il fit voir ainsi que [dans un courant d'eau] l'avant du corps, ou la partie exposée directement au choc[13], supportait une pression supérieure à la pression régnant au même niveau dans le courant antérieurement à l'introduction du corps solide ; et qu'en même temps l'arrière éprouvait une pression constamment inférieure à cette même pression primitive ; de sorte que le mouvement relatif du fluide et du solide engendre, sur ce côté postérieur, ce qu'il appelé une non-pression ou une sorte de succion ou d'attraction agissant dans le même sens que la pression sur l'avant. »

Du Buat lui-même écrivait dans le discours préliminaire de son texte PRINCIPES D'HYDRAULIQUE[14] : "[...] nous avons été assez heureux pour décomposer la résistance qu'un corps essuie pour se mouvoir dans un fluide, en deux efforts distincts, l'un qui s'exerce comme une pression en avant du corps, & l'autre comme un défaut de pression en arrière. Le premier est constant, si la grandeur & la forme du devant du corps restent les mêmes[15]. Le second varie suivant la longueur du corps, & diminue toujours à mesure que cette longueur augmente, indépendamment de la forme de l'arrière du corps qui fait aussi varier cette non-pression. La somme de ces deux efforts est sensiblement proportionnelle aux quarrés des vitesses, lorsqu'elles n'excèdent pas 3 à 4 pieds par seconde dans l'eau, & 20 à 24 pieds dans l'air [...]."

À propos du freinage que l’eau d’un fleuve ressent de la part de son lit

Barré de Saint-Venant[16] cite ainsi Du Buat : « Je me mis donc à considérer que si l'eau était parfaitement fluide et coulait dans un lit de la part duquel elle n'éprouvât aucune résistance, elle accélèrerait son mouvement à la manière des corps qui glissent [de plus en plus vite] sur un plan incliné ; puisqu'il n'en est pas ainsi, il existe quelque obstacle qui empêche la force accélératrice de lui imprimer de nouveaux degrés de vitesse. Or, en quoi peut consister cet obstacle sinon dans le frottement que l'eau essuie de la part des parois du lit, et dans la viscosité du fluide ? » « C'est donc, conclut [Du Buat], un principe évident et certain tout à la fois que quand l'eau coule uniformément dans un lit quelconque, la force qui l'oblige à couler est égale à la somme des résistances qu'elle essuie soit par sa propre viscosité soit par le frottement du lit. On verra quelle est la fécondité de cette loi.»
Saint-Venant ajoute : « Du Buat a rendu cet énoncé à la fois plus simple et plus exact dans son texte de 1786 (au no 20) en égalant seulement la force qui meut l'eau à la résistance qu'elle éprouve, et que l'on voit, plus loin, être seulement celle du lit ou de la paroi, sans y joindre la viscosité[16]. »

Œuvres

  • Principes d'hydraulique et de pyrodynamique vérifiés par un grand nombre d'expériences faites par ordre du gouvernement (éd. princeps en 1 vol. 1779, 2e éd. en 2 vol. 1786, dernière éd. révisée en 3 vol. 1816), éd. Firmin Didot, Paris
  • Principes d'hydraulique vérifiés par un grand nombre d'Expériences faites par ordre du Gouvernement, par le chevalier DU BUAT, Tome premier, 1786 [1]
  • Principes d'Hydraulique et de Pyrodynamique, tome second, par M. DuBuat, [2]
  • Mémoire sur quelques applications du ressort de l'air atmosphérique comprimé, considéré comme force motrice (1837), éd. B. Henry, Valenciennes, 32 p.

Commentaires sur les œuvres de du Buat

RÉSISTANCE DES FLUIDES CONSIDÉRATIONS HISTORIQUES, PHYSIQUES ET PRATIQUES relatives au problème de l'action dynamique mutuelle d'un fluide et d'un solide, spécialement dans l'état de permanence supposé acquis par leurs mouvements ; par M. de Saint-Venant, membre de l'Académie, Mémoires de l'Académie des sciences de l'Institut de France, 1888, [3]

  • Barré de SAINT-VENANT, NOTICE SUR LA VIE ET LES OUVRAGES DE PlERRE-LOUIS-GEORGES, COMTE DU BUAT, Lille, Impr. L. Danel, (lire en ligne)

Notes et références

  1. Source : Adhémar Barré de Saint-Venant, Notice sur la vie et les ouvrages de Pierre-Louis-Georges, comte Du Buat, colonel du génie... auteur des "Principes d'hydraulique", (lire en ligne).
  2. « AERI », sur museedelaresistanceenligne.org (consulté le )
  3. a b c d et e D'après André Guillerme, Bâtir la ville : révolutions industrielles dans les matériaux de construction, Champ Vallon, coll. « Milieux », , 315 p. (ISBN 978-2-87673-203-2, lire en ligne), « Biographies », p. 277
  4. Anita Oger-Leurent, « L’hôtel de ville de Condé-sur-l’Escaut : entre modèles français et enjeux locaux (1773-1785) », dans Hôtels de ville : Architecture publique à la Renaissance, Presses universitaires François-Rabelais, coll. « Renaissance », (ISBN 978-2-86906-540-6, lire en ligne), p. 345–365
  5. Emmanuel de Croÿ-Solre (1718-1784) et Vicomte de Grouchy et Paul Cottindu (dir.), Journal inédit du duc de Croÿ (1718-1784)., vol. 1, 1906-1921 (réimpr. publié d'après le ms. autographe conservé à la bibliothèque de l'Institut, avec introd., notes et index) (lire en ligne)
  6. D'après Bruno Belhoste et Jean Dhombres (dir.), L'Ecole Normale de l'An III : Leçons de Mathématiques : Lagrange, Laplace, Monge, Paris, Champ Vallon, coll. « Milieux », , 621 p. (ISBN 2-10-000288-0), « Ann. 16 – Le problème du défilement », p. 543
  7. D'après Joël Sakharovitch, Épures d'architecte, Zurich, Birkhaüser, , 427 p. (ISBN 3-7643-5701-0, lire en ligne), « Le problème du défilement », p. 229
  8. Dans RÉSISTANCE DES FLUIDES CONSIDÉRATIONS HISTORIQUES, PHYSIQUES ET PRATIQUES…, p. 38, Barré de Saint-Venant écrit : « […] c'est à tort que les théories d'Euler et de D'Alembert, comme la théorie ancienne, ne s'occupaient que de la partie antérieure du corps plongé, en négligeant la partie postérieure que l'on regardait comme soumise seulement à la pression hydrostatique ou de repos : il résulte des expériences de Du Buat que cette partie est moins pressée qu'au repos, ou subit une non-pression dynamique [on dit à présent une dépression], qui s'ajoute à la pression antérieure pour solliciter le corps ou pour résister à son mouvement ; »
  9. RÉSISTANCE DES FLUIDES, Saint-Venant 1886, p. 38
  10. Voir à ce sujet l'article Couche limite.
  11. NOTICE SUR LA VIE ET LES OUVRAGES DE PIERRE-LOUIS-GEORGES, COMTE DU BUAT 1866, p. 47
  12. NOTICE SUR LA VIE ET LES OUVRAGES DE PIERRE-LOUIS-GEORGES, COMTE DU BUAT 1866, p. 43
  13. ... "au choc" du fluide : c'est ainsi que l'on s'exprimait à l'époque en suivant (de trop près) le modèle de la mécanique des fluides collisionnelle de Newton. Il faut dire que l'action du fluide sur la face avant n'était pas quantifiée très précisément.
  14. PRINCIPES D'HYDRAULIQUE vérifiés par un grand nombre d'Expériences faites par ordre du Gouvernement, par le chevalier DU BUAT, Tome premier p.xxxvij
  15. Ce constat n'a qu'une valeur approximative dans la mesure où, en subsonique, il y a quand même action de l'arrière-corps sur l'avant-corps
  16. a et b NOTICE SUR LA VIE ET LES OUVRAGES DE PIERRE-LOUIS-GEORGES, COMTE DU BUAT 1866, p. 17

Annexes

Sur les autres projets Wikimedia :

  • Pierre du Buat, sur Wikimedia Commons

Bibliographie

Document utilisé pour la rédaction de l’article : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • Adhémar-Jean-Claude Barré de Saint Venant, NOTICE SUR LA VIE ET LES OUVRAGES DE PIERRE-LOUIS-GEORGES, COMTE DU BUAT, Lille, DANEL, (lire en ligne)
  • M. le chevalier DU BUAT, PRINCIPES D'HYDRAULIQUE vérifiés par un grand nombre d'Expériences faites par ordre du Gouvernement, par le chevalier DU BUAT, Tome premier, Paris, De l'imprimerie de Monsieur, (lire en ligne)
  • Adhémar-Jean-Claude Barré de Saint Venant, RÉSISTANCE DES FLUIDES CONSIDÉRATIONS HISTORIQUES, PHYSIQUES ET PRATIQUES RELATIVES au problème de l'action dynamique mutuelle d'un fluide et d'un solide, spécialement dans l'état de permanence supposé acquis par leurs mouvements, (lire en ligne)
  • André Guillerme Bâtir la ville (1995) éd. Champ-Vallon, Seyssel (ISBN 2-87673-203-3)
  • Antoine Picon L'invention de l'ingénieur moderne (1992), Presses des Ponts & Chaussées, Champs-sur-Marne (ISBN 2-85978-178-1)
  • Pierre Dugas Histoire de la mécanique (1956), éd. du Griffon, Neufchâtel, Suisse
  • G.A. Tokaty A history and philosophy of fluid mechanics (1971), ed. Foulis, rééd. par Dover (ISBN 0-486-68103-3)

Articles connexes

Liens externes

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